Lukas Geniusas à Paris Salle Cortot

Soirée exceptionnelle à Cortot. La salle pleine et le silence pendant les morceaux disent les grands soirs, les plus grands même. Un interprète qui révèle une œuvre, ouvre tout un monde et vous y tient par la main, cela fait du bien. Mais quand cette œuvre, quand ce monde pénétre et éclaire le vôtre, le bonheur n’est pas loin. À portée de main(s) et du coeur.

Le Schubert est un voyage. La forêt de la balade du 1er impromptu tend ses arbres puissants vers le ciel pour dompter la lumière. Leurs racines plongent aussi au plus profond. Le souffle et la flamme maintiennent nos pas que guide le bruit d’une onde. Un rêve ? Non, un idéal. On trouve cette eau qui émerveille et on y plonge, plein de fièvre et d’envie de s’y fondre. Mais, sorti de la forêt et épris d’un idéal, on ne peut que la voir passer, comme un arbre planté au bord de la rivière. Le rapide menuet qui suit nous remet en marche et les esprits en place, comme une formule de magie avec une baguette et ses étoiles qui scintillent.

La Sonate de la seconde partie est à couper le souffle. “La différence entre la version originale de la Sonate n° 1 et la deuxième version, plus courte de plus de 100 mesures, n’est pas seulement une question de longueur” explique Lukas Geniušas. “Il y a beaucoup de choses perdues entre la première et la deuxième édition. Je sais que cela va à l’encontre des idées reçues, mais je dirais que cette sonate est l’une des meilleures œuvres pour piano solo de Rachmaninov, si ce n’est la meilleure. Sa puissance bouleversante, sa splendeur et son ampleur ne peuvent être comparées qu’au troisième concerto pour piano, écrit peu après.” Et c’est vrai. Un torrent de passion et un océan d’émotions coule, s’emplit et gronde devant nous. Rien ne nous submerge et tout nous nourrit. On sort de ce bain le cœur grandi et l’âme claire. Quatre bis généreux, subtils, amusés, tendres ou rythmés, nous laissent pantois. Et si la musique jouée par un tel artiste avait le don de réunir la nature et l’idéal ?

Nuits du Piano Paris, 6 décembre 2023

Franz Schubert

Quatre Impromptus op.90 D.899

Menuet D. 600

Serguei Rachmaninov

Sonate n°1 op. 28 (1ère version)

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