L’Opéra de Paris propose pour cette rentrée, la reprise de la production de Faust de 2022. Faust, avec Carmen, demeure l’oeuvre la plus jouée des opéras français depuis un siècle et demi.
Très inventive, la mise en scène de Tobias Kratzer transpose l’action au cœur de Paris et de sa banlieue, utilisant efficacement des vidéos ou des scènes filmées en gros plan dont les résultats sont spectaculaires, empruntant de nombreuses références au cinéma et nous surprenant à plusieurs reprises. Certes, certaines scènes sont assez kitchs – le survol d’un Paris illuminé par Faust et Mephisto, leur chevauchée sur les quais de seine) mais on y trouve aussi une forme de féérie très plaisante.
Les décors sont multiples, de l’appartement cossu de Faust au premier au terrain de basket de Valentin et ses amis, en passant par le sinistre HLM banlieusard de Marguerite, un cabinet d’échographie, en lieu et place de sa chambre, ou une rame de métro remplaçant l’église. Tout cela est assez audacieux et fait rapidement passer les près de 4 heures de la soirée.
Dynamique, la direction scénique est réglée au cordeau, avec des artistes bien mobiles utilisant parfaitement l’espace proposé. Le casting s’avère d’aussi bonne qualité qu’il y a deux ans.
Nous retrouvons Florian Sempey en Valentin, qui déploie lors de ses deux interventions un ramage puissamment projeté. Alex Esposito incarne un Méphistophélès maléfique, entouré de ses six diablotins. Le baryton italien dispose d’un instrument puissant, au timbre grave et profond droitement projeté. Teinté d’une pointe d’humour, son jeu sur scène sied parfaitement au personnage diabolique qu’il interprète.
Petite réserve concernant la Marguerite d’Amina Edris. La charmante soprano égyptienne déploie certes sa voix au timbre clair et soyeux, mais manque clairement de puissance pour une enceinte comme celle de Bastille, avec des aigus tendus qui peinent à couvrir l’orchestre et tournent dans leurs extrêmes à la limite du nasillard. Sa présence scénique reste de qualité, et ses gros-plans dans l’air des bijoux où celui de la scène (très réussie) du métro atteste de ses qualités de comédienne.
Enfin dans le rôle-titre, Pene Pati confirme l’étoile montante qu’il est en train de devenir. Son chant est d’une élégance folle. Doté d’un magnifique ambitus, il nous offre de somptueux pianis et des aigus limpides et lumineux – son contre-ut lors de sa cavatine passe sans la moindre difficulté. Avec une diction parfaite, le colosse Samoan aura accompli une prestation magistrale.
Les chœurs sont également à l’honneur, avec en point d’orgue le célèbre « gloire immortelle », interagissant harmonieusement avec un orchestre conduit sur un tempo rapide par un Emmanuel Villaume inspiré. On retiendra notamment de jolis solos de bois ! !
Une belle soirée, longuement saluée par un public manifestement ravi.
Faust, de Gounod
Production : Opéra National de Paris
Direction d’orchestre : Emmanuel Villaume
Mise en scène : Tobias Kratzer
Distribution
Faust : Pene Pati
Méphistophélès : Alex Esposito
Marguerite : Amina Edris
Valentin : Florian Sempey
Siébel : Marina Viotti
Wagner : Amin Ahangaran
Marthe Schwertlein : Sylvie Brunet-Grupposo
Équipe artistique
Costumes : Rainer Sellmaier
Décors : Rainer Sellmaier
Lumières : Michael Bauer
Video : Manuel Braun
Direction de choeur : Alessandro Di Stefano
Orchestre de l´Opéra National de Paris
Chœur de l’Opéra national de Paris
Opéra National de Paris
Paris, Opéra Bastille – Jeudi 26 septembre 2024