Falstaff, de Verdi à l’opéra-Bastille.

En 1893, Verdi au crépuscule de sa vie compose son dernier opéra, tiré des Joyeuses Commères de Winsdor de Shakespeare et écrit sous forme d’opéra-bouffe. Point d’aria mémorable ni de tragédie lyrique mais une joyeuse farce soutenue par une partition brillante. L’Opéra de Paris reprend la production de Dominique Pitoiset, montée il y a un quart de siècle – et vue ici même en 2013 – qui reste efficace mais pas particulièrement brillante.

L’action est transposée dans le Londres de la fin du 19éme siècle, au moyen d’un décor coulissant nous transportant de la taverne qu’occupe Falstaff et ses serviteurs aux maisons des Ford et de Mrs Quickly. Quelques accessoires posés en bord de scène nous conduisent chez le barbier ou bien dans les appartements d’Alice. Au dernier acte, le grand chêne sous lequel se dénoue l’intrigue n’est figuré que par une projection vidéo sur le mur de la taverne. Bon, cela aurait pu être plus fouillé mais reste agréable à l’œil.

Falstaff est un chevalier anglais décadent et sans le sou dont l’essentiel de la vie consiste à manger, boire… et grossir. Pour retrouver des fonds, il entend séduire Alice Ford et son amie Meg, dont les maris sont richissimes, mais son stratagème éventé finira par se retourner contre lui. Tel un vaudeville, la scénographie est vive et sans temps-mort, avec un casting  d’excellente facture.

Dans le rôle-titre, Ambrogio Maestri campe un Falstaff imposant et truculent. Le baryton italien habite ce rôle depuis de longues années. Son organe puissant en impose jusqu’au fond des travées. Chaud et profond, son timbre fait merveille et sa présence scénique dans un rôle de bouffon reste exceptionnelle – il parviendra même à nous émouvoir sur le final. En Fenton, le nouveau venu à Paris Ivan Ayon Rivas est une révélation : son rôle lui offre deux jolis arias que le ténor péruvien déclame avec enthousiasme au moyen d’aigus rayonnants. Andrii Kymach interprète un Ford jaloux, doté d’un timbre limpide et d’une projection vocale très droite.

Olivia Boen fait également ses débuts à Paris en Alice Ford et nous offre une voix claire et des aigus radieux. Frederica Guida, qui incarne sa fille Nannetta propose un chant lumineux et une large palette qui pourrait la conduire vers le colorature. Enfin, quel plaisir de voir sur scène la grande Marie-Nicole Lemieux qui saisit avec gourmandise le rôle de Quickly et déploie avec aisance son medium profond.

Dans la fosse, Michael Schonwandt tire parti avec aisance d’une partition audacieuse où de nombreux pupitres sont à l’honneur. Le tempo est élevé, le respect avec la scène total. Les très rares chœurs – au final principalement – contribuent à l’harmonie musicale générale. En ce soir de dernière, les artistes auront été chaleureusement ovationnés par un public séduit. Un bon spectacle, sans être exceptionnel mais pour lequel la présence de Maestri justifie le déplacement.

Falstaff, Verdi

Production : Opéra National de Paris

Direction d’orchestre : Michael Schønwandt

Mise en scène : Dominique Pitoiset

Distribution

Sir John Falstaff : Ambrogio Maestri
Ford : Olivia Boen
Mrs. Alice Ford : Andrii Kymach
Nannetta : Federica Guida
Mrs. Meg Page : Marie-Andrée Bouchard-Lesieur
Mrs. Quickly : Marie-Nicole Lemieux
Fenton : Iván Guillermo Ayón Rivas
Dott. Cajus : Gregory Bonfatti
Bardolfo : Nicholas Jones
Pistola : Alessio Cacciamani

Équipe artistique

Direction de choeur : Alessandro Di Stefano
Décors : Alexandre Beliaev
Costumes : Elena Rivkina
Lumières : Philippe Albaric, Christophe Pitoiset

Orchestre de l´Opéra National de Paris
Chœur de l’Opéra national de Paris

Paris, Opéra Bastille – Lundi 30 septembre 2024

Auteur : Cyril Malapert

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